ALLOCUTION OFFICIELLE 14emes journées CSH-SNPHPU MARSEILLE 2019 Pr Pascal Le Corre – Président du SNPHPU

Article créé le
25/09/2019
-
modifié le 25/09/2019

ALLOCUTION OFFICIELLE 14emes journées CSH-SNPHPU Marseille 2019

 

Pr Pascal Le Corre – Président du SNPHPU

 

Messieurs les Présidents,

Cher(e)s collègues, cher(e)s ami(e)s,

 

 

Introduction

 

Un petit clin d'œil avant mon discours.

Au CNG il y a eu du mouvement cet été, puisque Mme Danielle Toupiller a fait valoir ses droits à la retraite et a quitté ses fonctions à la direction du CNG, fonction qu'elle occupait depuis 2007. Il nous faut saluer l'esprit d'ouverture et d'écoute continu qu'elle a témoigné quand nous l'avons sollicitée et la remercier de sa présence régulière et amicale à nos journées CSH. Elle est remplacée par Mme Ève Parier à compter du 1er septembre, qui n'a pu répondre favorablement à notre invitation en raison d'un agenda un peu tendu du fait de sa prise de fonction récente. Nous espérons vivement avoir l'écoute que nous avions auprès de Danielle Toupiller et sa présence pour les CSH futures.

J'aimerais partager avec vous quelques réflexions sur des sujets qui nous touchent.

 

Le décret PUI

 

Nous l'attendions … il est arrivé le 21 mai 2019 (Décret relatif aux pharmacies à usage intérieur no 2019-489) après une gestation un peu longue (l'Ordonnance PUI date de décembre 2016).

 

Pour celles et ceux qui l'ont lu en détail (j'imagine évidemment que c'est le cas de toutes et tous les collègues), vous avez noté que ce n'est pas une révolution en soi pour nos missions et nos activités. Je ne vais pas reprendre ici en détail le décret, nous en avons discuté hier en AG, mais faire quelques commentaires.

 

Vous avez noté, qu'en cohérence avec l'ordonnance de 2016 qui a introduit la pharmacie clinique dans le corpus de nos textes, le décret liste 5 actions de pharmacie clinique et on ne peut que s'en féliciter.

Il serait utile que notre société savante (la SFPC) apporte aux collègues des précisions sur certaines des 5 actions qui sont " listées un peu à la Prévert " dans le décret, sans hiérarchie ni chronologies évidentes. Si la réalisation d'un bilan de médication, d'un entretien pharmaceutique ou d'un plan pharmaceutique personnalisé prête assez peu à discussion, les modalités en sont connues, les actions dites " d'expertise pharmaceutique clinique des prescriptions " et " d'élaboration de la stratégie thérapeutique " sont beaucoup plus intégrées et mériteraient d'être précisées pour indiquer ce que cela sous tends.

 

Dès l'instant que ces " actions " sont référencées dans un texte important de notre profession, il nous paraît utile que l'on soit en phase sur les termes utilisés. Ceci serait d'autant plus utile à l'heure où les textes sur la réforme du DES de Pharmacie Hospitalière vont être publiés.  

 

L'ordonnance PUI de 2016 avait indiqué que toutes les missions des PUI (L5126-1) pouvaient être exercées "pour le compte d'une ou plusieurs autres PUI " dans le cadre d'une coopération ou d'un GHT.

Sur ce sujet le décret a ajouté que les 10 activités soumises à autorisation peuvent être assurées pour le compte d'autres PUI. Il est certainement plus simple dans la mise en œuvre d'exercer pour une autre PUI une activité (plutôt ciblée) plutôt qu'une mission.

 

Pour autant nous attirons votre attention sur la nécessité d'établir des conventions précisant clairement les responsabilités de chacun (" qui fait quoi " et donc " qui est responsable de quoi ").

Vous avez bien noté que les conventions de coopération sont différentes des conventions de sous-traitance (dans lesquelles il y a un donneur d'ordre et un sous-traitant, donc " on fait pour "). Dans une convention de coopération, on fait " à la place de ".

 

Il est regrettable que les conventions ne soient pas - de manière formelle – co-signées par les pharmaciens gérants concernés (c'est également le cas d'ailleurs pour convention d'assistance pour remplacement par un interne). C'est un point que nous avions notifié à la DGOS dans les échanges (très peu nombreux) qu'il y a eu sur le décret.

 

Loi de Santé 2022 (24 juillet 2019)

 

Décloisonner les parcours de formation et les carrières des professionnels

 

Prévoit le remplacement de la PACES que personne ne va regretter, le nouveau système devrait permettre un recrutement plus diversifié (en théorie). Textes sont en attente.

 

Par ailleurs, il y a des modifications de statuts de praticiens à l'étude. Nous sommes (au sein de la CMH et avec le SNAM-HP) favorable à un statut unique à durée de temps variable (Temps Plein, Temps Partiel et Attaché) mais avec un accès national par concours et une nomination par le CNG (reste à définir les modalités d'inscription sur les listes d'aptitude, nature du concours….).

Le groupe de travail initié par la DGOS n'a semble-t-il pas été réactivé à la rentrée … mais nous espérons des réunions de concertation sur ce dossier.

 

La loi introduit la procédure de certification ou plutôt de re-certification ; concept en application dans de nombreux pays anglo-saxons. Le Pr Serge Uzan, doyen honoraire de la faculté de médecine Pierre et Marie Curie, a été chargé d'un rapport sur ce sujet, remis en novembre 2018 aux Ministres de la Santé et des Universités. L'objectif de la re-certification est l'actualisation des connaissances et le maintien des compétences et de la qualité des pratiques professionnelles (cette démarche doit refléter la vie et le parcours professionnel).

 

Ce processus est en phase avec la réforme du 3eme cycle des études médicales (et pharmaceutiques à venir) dans lesquelles chaque interne aura un portfolio permettant le suivi de l'acquisition de ses connaissances et de ses compétences au cours de sa formation. Ce portfolio permettra la validation de sa formation (i.e., niveau de référence des compétences, validation du DES). Ce portfolio de formation sera ensuite transféré dans le portfolio professionnel.

Qu'en sera-t-il de la mise en œuvre de la re-certification ? : des ordonnances (toujours et encore) sont prévues dans un délai de 1 an pour les médecins et de 2 ans pour les autres professions, dont les pharmaciens.

Qui sera concerné ? : pour les professionnels actuellement en exercice cela pourrait être sur la base du volontariat et obligatoire pour les nouveaux professionnels. Par ailleurs, une articulation sera à trouver avec le DPC actuel qui devrait être intégré dans le processus.  Il est à souhaiter que le dispositif de re-certification soit dématérialisé et simple et pas une " nouvelle usine à gaz ".

 

 

Structuration de l'offre de soins dans le territoire

 

Cette structuration se concrétise par la labellisation d'hôpitaux de proximité (600 prévus) et le développement de Communautés Territoriales de Professionnels de Santé (1 000 CPTS, crées dans une Loi de santé précédente).

Les CPTS, nous allons en discuter cette après-midi avec la table ronde " CPTS : pharmacien hospitalier as-tu ta place ? ".

Pour les hôpitaux de proximité, nous sommes en attente de précisions sur leurs missions dont découlerons les activités de leurs PUI. Ces hôpitaux font partie du GHT et donc soumis au projet pharmaceutique du GHT et devront donc être intégrés dans les réflexions.

 

Pour les GHT, il est prévu un renforcement de la stratégie et de la gouvernance médicale pour plus d'intégration (CME de groupement, gestion des RH en cohérence avec la stratégie médicale du groupement… fusions d'instances … fusion d'ETS).

Il n'y a actuellement pas d'excès de concertation sur les projets de textes (ordonnances)….des réunions avec la DGOS annulées – reportées …. Cette concertation limitée est préjudiciable à la dynamique souhaitée par le ministère pour une intégration territoriale renforcée.

 

Dans le cadre de cette intégration renforcée, s'il devait y avoir des fusions d'ETS cela aboutirait de fait à une PUI unique pour le nouvel ETS. Les collègues pharmaciens qui sont/seront concernés par ces fusions vont devoir être vigilants et faire des propositions pour définir un projet pharmaceutique permettant une amélioration de la qualité des prestations pharmaceutiques.

Ceci devra se faire en assurant une couverture pharmaceutique effective des différents sites géographiques du nouvel ETS. C'est-à-dire que : "où il y a des patients et des cliniciens, il y a des pharmaciens ".

Ces réorganisations devront se faire dans le respect des compétences et des souhaits des collègues et nous serons à l'écoute des collègues qui ne se retrouveraient pas dans ces nouvelles organisations.

 

Développer l'ambition numérique en santé.

 

L'objectif est de stimuler l'innovation et recherche clinique, cette ambition s'est traduite par la création du Health Data Hub avec la constitution d'entrepôts régionaux de données hospitalières permettant des fouilles de données (i.e., " data mining ").

Le développement de ces entrepôts de données et les recherches qu'ils permettent sont importants et les pharmaciens hospitaliers devraient se rapprocher des équipes médicales qui pilotent ces entrepôts de données (i.e., Départements d'Information Médicale des CHU et ETS du territoire). Il y a là une opportunité pour être à l'initiative de projets de pharmaco-épidémiologie et d'évaluation du bon usage des produits de santé.  

 

Dans ses dernières pages, la loi de santé a ratifié un certain nombre d'ordonnances tout en amendant certains de ces textes …. Comme vous le savez " le diable se niche dans les détails ".

 

Entre regardant de près, la loi de santé de juillet 2019 a ratifié une ordonnance de 2017 (no 2017-49 du 19 janvier 2017) qui était " relative aux avantages offerts par les personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé ".

La loi de Santé a modifié au passage un des articles de l'ordonnance de 2017 (Article L1453-7) en excluant du champ des bénéficiaires les étudiants en formation initiale (dont les internes) et les associations d'étudiants.

L'hospitalité offerte par nos partenaires industriels (i.e., prise en charge de trajet + hôtel + inscription), " de manière directe ou indirecte, lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel ou scientifique " n'est donc plus autorisée pour les internes.

Cela pose évidemment un problème majeur pour nos internes qui n'ont pas de sources de financement possible à l'hôpital et très peu à l'université. Il nous semble que cela aura un impact délétère pour leur formation puisque la participation aux sessions scientifiques/professionnelles des congrès est un moyen de formation et une opportunité de présentation de leurs travaux (e.g. sélection à une communication orale).

 

Le SNPHPU a pris l'initiative d'une réflexion commune auprès de collègues président de SFPC, SFPO, le Synpref et l'ANEPC, et en lien évidemment avec la FNSIP et pour une action concertée.

 

Elections

 

2019 a été une année électorale.

L'élection à la section H de l'ordre des pharmaciens au printemps dernier a permis un renouvellement important des élus. Nous souhaitons bonne chance à la nouvelle équipe pour défendre l'indépendance du pharmacien dans son exercice hospitalier.

 

Si le taux de participation à l'élection ordinale a été assez modeste, la participation aux élections professionnelles (i.e., commission statutaire nationale et conseil de discipline) a beaucoup mobilisé les collègues (environ 50 % de votants). Votre mobilisation a permis de maintenir la représentation du SNPHPU à la CSN et au CD (1 en PH et 4 pour HU), cela n'a pas été le cas de tous les syndicats….

Je laisserai nos amis Norbert Skurnik et Sadek Beloucif nous faire un retour sur ces élections où nos inter-syndicales, CMH et SNAM-HP réunies, ont obtenu une majorité de représentation des disciplines.

 

 

CNP-DPC

 

Le SNPHPU a milité pour qu'il y ait - non pas un collège national professionnel (CNP) commun de la pharmacie - mais qu'il y ait un collège professionnel indépendant pour la pharmacie hospitalière et la pharmacie d'officine et ce afin de mieux prendre en compte les spécificités de nos métiers. Nous étions minoritaires sur cette position avec la fédération des syndicats de pharmacien d'officine, la FSPF.

La conséquence : un collège national professionnel (CNP) commun à la pharmacie d'officine et la pharmacie hospitalière a été créé (arrêté du JO 21/08/2019). Dont acte.

Une des attributions des CNP est de proposer les orientations de DPC.

Les orientations pluri-annuelles prioritaires de DPC ont été publiées (arrêté du 31 juillet 2019). Ces orientations sont identiques pour la pharmacie d'officine et la pharmacie hospitalière…. Nous avons certes des points communs avec l'officine mais de là à ce que les orientations soient identiques.

Cela constitue une perte de reconnaissance des spécificités des différents modes d'exercice de la pharmacie et des spécialisations existantes (DES Pharmacie hospitalière) ou à venir (DES de pharmacie d'officine). Pas sûr que cela soit judicieux comme affichage auprès des autorités de santé, que ce soit pour l'officine ou les PUI.

 

 

Traçabilité - Interopérabilité

 

La traçabilité des DMI est une nécessité en termes de santé publique. Pour autant il faut faire attention à " qui fait quoi " et " comment on le fait " (un projet d'arrêté et guide pratique sont en attente).

Les PUI prendront leur part dans la traçabilité des DMI mais il y a nécessité d'impliquer les personnels des services utilisateurs (clinicien qui pose le DMI – IBODE) et ensuite que l'information puisse être transmise dans le DMP.

Cela pose évidemment le problème de l'inter-opérabilité des différents logiciels métiers que nous utilisons et ce problème va au-delà des seuls DMI.

Il y a des difficultés techniques de mise en route de la sérialisation, par ailleurs nous allons être confronté à la saisie d'indication des médicaments hors GHS et à l'intégration d'un nouveau code pour les DM avec code générique à la LPPR ….

Les déficiences d'interopérabilité des logiciels sont le plus souvent compensées par la mise à disposition de ressources humaines (RH) dans nos PUI ce qui n'est plus tenable (et expose de plus à des risques de non qualité).

Nous souhaiterions que l'état prenne ses responsabilités et impose des évolutions ad hoc aux éditeurs de logiciels.

 

 

 

Pénuries de médicaments

 

Les pénuries de médicaments (ruptures de stock ou difficultés d'approvisionnement) alimentent un peu trop l'actualité. Il faut noter que ces pénuries ne touchent pas que les médicaments mais également les dispositifs médicaux dans nos ETS. Au-delà des risques potentiels de perte de chance pour les patients, ces pénuries entraînent une désorganisation des circuits d'approvisionnement dans nos ETS et sont très chronophages, en particulier pour les personnels de nos PUI (pharmaciens hospitaliers et PPH) et constituent une perte de RH pour assurer nos missions.

Les causes sont multiples et connues avec des rapports récents sur le sujet (Sénat en octobre 2018, Académie Nationale de Pharmacie mai 2018, rapport EAHP 2018), alors il nous semble que pour les pouvoirs publics est venu le temps de l'action. Le sujet n'est pas simple et il y a certainement un panel de mesures à mettre en œuvre (certaines avec une coordination européenne).

Des mesures volontaristes peuvent être prises ….à  titre d'exemple la Belgique a voté en 2019 une loi qui stipule que " les grossistes-répartiteurs ne peuvent approvisionner que le marché belge, dans le cadre de leurs obligations de service public ".

 

 

Réforme du 3eme cycle en pharmacie

 

Les textes doivent paraitre très bientôt … pour mise en œuvre à la rentrée 2019.

La réforme du 3eme cycle de pharmacie est calée sur la maquette générale du DES de médecine, avec 3 phases : socle (2 ans), approfondissement (1 an) et consolidation (1 an), thèse passée en fin de 3eme année et DES en fin de 4eme année.

Le texte prévoit une différenciation des missions-responsabilités confiées aux internes selon l'avancement de leur cursus et un suivi du projet professionnel avec un portfolio permettant un suivi d'acquisition des compétences. En ce sens, cette réforme constitue une avancée par rapport au système actuel.

A noter que l'organisation devient régionale et non plus inter-régionale (mais des échanges inter-CHU seront possibles selon les maquettes des internes).

 

Mes cher(e)s collègues, la loi de santé 2022 est vectrice de changements au sein de notre système de santé avec toutefois de nombreuses inconnues qui tiennent aux ordonnances à venir et pour lesquelles la concertation doit être améliorée.

Toutefois, pour la pharmacie hospitalière nous avons tous les textes attendus (ordonnance 2016 et décret PUI de 2019 qui fixent nos missions et activités, réforme du 3eme cycle pour la formation des pharmaciens hospitaliers de demain), alors je vous souhaite toute l'énergie, l'imagination mais aussi la sagesse pour les utiliser au mieux afin de déployer nos activités au sein des territoires et au plus près des patients.

 

Remerciements

Mots clés